Engagements sociaux et notamment Indemnités de Fin de Carrière : anticipez les impacts dans vos budgets et comptes 2022 au vu de l’évolution des taux !
Décryptage par Delphine CASTELLA
Associée – Directrice Générale Déléguée Sémaphores
Delphine Castella, pouvez-vous nous expliquer en quoi consistent les engagements sociaux ?
Les engagements (notamment Indemnités de Fin de Carrière) génèrent chaque année pour les entreprises, et notamment pour les EPL, des écritures comptables, particulièrement lorsque ces engagements augmentent des provisions, passant par le compte de résultat et affectant le résultat net.
Le Plan Comptable Général a fait de la comptabilisation des engagements sociaux au passif de la société, la méthode préférentielle de comptabilisation. De fait, en cas de variation de l’estimation des provisions, cela passe par les comptes : il importe donc d’en mesurer exactement le poids et d’anticiper les charges futures.
Lorsque cet engagement est différé dans le futur, les entreprises et EPL sont confrontées à l’obligation d’évaluation du passif représenté par leur devoir, en tant qu’employeur, d’accompagner les salariés arrivant à la retraite par l’octroi d’indemnités. À noter que parfois certaines entreprises ou EPL mettent en place des contrats d’assurance permettant de pallier ce risque au travers d’une cotisation annuelle.
Quelle est la méthode de calcul utilisée ?
Pour les besoins de cette évaluation, les entreprise et les EPL, utilisent des méthodes actuarielles pour l’évaluation qui leur permettent d’en tirer les conséquences comptables et sur le niveau de provision à passer dans leurs comptes. Il s’agit d’un calcul, d’une valorisation d’un droit souvent indexé sur un salaire différé actualisé et probabilisé. En deux mots, la valorisation des Indemnités de Fin de Carrière va en général se fonder sur l’utilisation d’hypothèses comme :
- Les anticipations d’augmentation des salaires de la structure,
- Les hypothèses de sorties de type mortalité ou turn-over,
- Les hypothèses économiques de type inflation et taux d’actualisation.
Ce sont les évolutions de ces paramètres de marché qui vous interpellent aujourd’hui ?
En effet. Selon le recueil de l’Autorité des Normes Comptables, « le taux d’actualisation à appliquer pour actualiser les obligations au titre des avantages postérieurs à l’emploi (que ceux-ci soient financés ou non) doit être déterminé par référence à un taux de marché à la date de clôture fondé sur les obligations d’entreprises de première catégorie (de haute qualité selon la Norme IAS 19)»
En pratique, les obligations de sociétés de première catégorie ou de haute qualité font référence aux Obligations d’Entreprise notées AA, souvent sur des durées de 10-12 ans. Ce taux n’est pas un taux sans risque, il reflète la valeur temps de l’argent. Une entreprise applique souvent un taux d’actualisation unique qui reflète la durée de l’engagement (on parle de « duration »). Les taux de référence utilisés sont généralement les taux Iboxx Corporate AA, en fonction de la duration des engagements.
Quels sont les taux utilisés, et les impacts potentiels pour les entreprises et EPL ?
Au 31.12.2021, le taux d’actualisation moyen retenu par les entreprises était de l’ordre de 0,6% (pour une duration d’environ 10 ans). À la fin Octobre 2022, les taux de référence sont supérieurs à 3%. Soit une hausse de près de 250 points de base en 1 an.
Source SPAC Actuaires, 21/11/2022, https://www.spac-actuaires.fr/lexique/taux-dactualisation-historique
Source EY, 2022, Taux d’actualisation IAS 19 Zone Euro – 30 septembre 2022
Une hausse de cette ampleur peut entraîner une baisse conséquente de la dette actuarielle qu’il est important d’anticiper dans le cadre de l’établissement des atterrissages 2022 par les entreprises et les EPL.
Les impacts seront différents selon les choix retenus :
- Les entreprises qui ont externalisé la gestion des IDR devraient être peu impactées.
- Les entreprises qui gèrent ce passif social latent en hors-bilan ne seront pas impactées sur leur résultat (le montant de l’engagement hors bilan mentionné en annexe sera à modéliser et devrait évoluer à la baisse, mais c’est simplement une information).
- Les entreprises qui choisissent de provisionner ce passif social devraient être impactées, favorablement, par une reprise en fin d’année. Cette ampleur varie selon la situation de chaque entreprise, mais peut atteindre 15% à 35% sur la base des premières simulations réalisées.