Simplifier le dialogue social dans la fonction publique :
une promesse tenue ?
Un article rédigé par :
Nina GREGOIRE – Consultante – Sémaphores
Quatre ans après la loi de transformation de la fonction publique, le bilan s’esquisse entre rationalisation des instances, économies incertaines et un dialogue collectif en quête de renouveau. Le rapport de la Cour des comptes, publié le 23 octobre 2024, dresse un bilan détaillé des réformes engagées, intitulé « Une réforme inaboutie du dialogue social dans la fonction publique », et propose des clés pour relever les défis d’un dialogue social modernisé et efficace.
La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique ayant pour but de transformer le dialogue social au sein du service public avait deux principaux objectifs :
- La simplification de celui-ci ;
- La baisse des coûts qu’il engendre.
Pour l’ensemble des fonctions publiques, cela s’est traduit notamment par :
- Une fusion des comités techniques (CT) et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en une instance unique ;
- La réduction du rôle des commissions administratives paritaires (CAP) aux décisions disciplinaires, leur retirant la compétence de gestion individuelle des carrières (promotions, mutations…), et limitant ainsi l’intervention des syndicats comme intermédiaires entre agents et employeurs.
La Cour des comptes s’est employée à faire un bilan de l’avancée de ces réformes au sein même des collectivités. Un premier constat se dessine : le nombre d’instances de dialogue social a diminué dans la fonction publique ces dernières années, notamment les commissions administratives paritaires (CAP), qui sont passées de 5 000 en 2019 à environ 4 000 en 2023 pour la fonction publique de l’État. En revanche, les grandes collectivités territoriales ont été les plus touchées dans la fonction publique territoriale.
Parallèlement, des formations spécialisées dédiées à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail ont été introduites pour compenser la réduction des instances comme les CHSCT, mais leur mise en place varie selon les fonctions publiques. Alors que leur nombre reste stable dans la fonction publique de l’État, il a diminué dans les fonctions publiques hospitalière et territoriale. Cette réorganisation ne permet pas de conclure à une simplification effective du dialogue social.
La Cour des comptes a par ailleurs dressé un constat financier et estime à 874 millions d’euros le coût global consacré au dialogue social dans les trois fonctions publiques, pour un total de 5,7 millions d’agents. Cette évaluation reste cependant partielle. Ces dépenses englobent notamment l’organisation des élections syndicales, les locaux et matériels nécessaires, ainsi que les facilités accordées aux syndiqués pour exercer leurs mandats. Par ailleurs, la Cour des comptes souligne qu’un surcoût de 14,6 millions d’euros subsiste, en raison de droits supplémentaires dérogatoires historiques encore en vigueur au sein des syndicats.
D’autre part, la volonté de favoriser l’outil de négociation syndicale sur des aspects collectifs et stratégiques de la vie professionnelle des employés a été mise en avant dans les objectifs de la création de la loi (incluant la question du service minimum). Cependant, seuls 200 accords collectifs en tout et pour tout ont été signés au sein de l’ensemble des fonctions publiques malgré une volonté des parties de s’engager dans cette pratique.
La Cour des comptes recommande, notamment pour optimiser le temps libéré par la réforme, une réflexion sur les missions des ressources humaines, en distinguant la gestion de proximité et le dialogue social de l’approche stratégique des ressources humaines. L’adoption d’outils comme la médiation est également préconisée.
Par ailleurs, pour renforcer la logique conventionnelle dans la fonction publique, il est crucial de clarifier les droits des acteurs sociaux, d’instaurer des formations communes entre délégués et employeurs et de valoriser l’engagement syndical.
Enfin, les 200 indicateurs de la Base de données sociales (BDS), trop nombreux et variés, compliquent le dialogue social. Réduire leur nombre et cibler les données essentielles, notamment budgétaires, est indispensable pour en améliorer la pertinence et alléger la charge administrative.
Conclusion : une réforme en quête de simplification et de performance
L’application de la loi de 2019 n’a produit qu’une partie des effets souhaités lors de son implémentation. Pour parvenir à une réelle simplification du dialogue social et une baisse des coûts de celui-ci, quelques recommandations supplémentaires sont nécessaires.
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