Logement social : le contrat de mixité sociale intercommunal, une fausse souplesse offerte par la loi ?
La loi 3DS, définitivement adoptée le 21 février dernier, vient assouplir les règles du jeu des obligations de production de logements sociaux (LS) instaurées par la loi SRU pour les collectivités locales. Elle apporte une progressivité aux communes dans l’atteinte de leurs objectifs (20 ou 25 % de logements sociaux). Désormais, les objectifs de production qui sont fixés par période triennale sont de 33 % de ce qui lui manque pour atteindre le niveau fixé par la loi SRU. L’objectif est porté à 50 % si l’écart est de 2 à 4 points, voire 100 % si l’écart est inférieur à deux points.
Dans son article 68, la loi 3DS vient pérenniser un mécanisme qui avait été instauré à titre expérimental et qui permet d’assouplir ce principe de rattrapage : le contrat de mixité sociale (CMS). Il s’agit d’un contrat conclu a minima entre une commune, son Établissement Public de Coopération Intercommunale d’appartenance (EPCI) et l’État. Il détermine, pour chaque période triennale et pour chacune des communes signataires, les objectifs de réalisation de logements locatifs sociaux (LLS) à atteindre ainsi que les engagements pris, notamment en matière d’action foncière, d’urbanisme, de programmation et de financement des logements. Il permet surtout d’abaisser les objectifs de rattrapage SRU des communes déficitaires et d’apporter encore davantage de progressivité.
La loi vient en réalité introduire deux types de CMS : le CMS communal, et le CMS intercommunal. Le CMS communal permet de réduire les objectifs SRU de 25 à 32 %. Le CMS intercommunal est encore plus généreux, car il permet de réduire jusqu’à moitié les objectifs SRU, dans un objectif intercommunal de mutualisation.
Taux de rattrapage minimum des LS manquants par période triennale, pour une commune devant viser 25 % de LS parmi ses résidences principales.
Clé de lecture : une commune qui aurait moins de 21 % de LS parmi ses résidences principales et à qui il manquerait par exemple 100 logements pour atteindre son taux réglementaire de 25 %, devrait produire minimum 33 LS sur une période triennale (selon le principe de la loi) ou 25 si elle signe un CMS communal, voire 16 si elle bénéficie d’un CMS intercommunal.
Il est important de préciser que le CMS intercommunal ne peut être conclu que si le territoire est couvert par un Programme Local de l’Habitat (PLH). Le CMS permet alors de sortir d’une approche strictement mécanique pour conduire une réflexion sur la place du LS dans un territoire.
Toutefois, les perspectives ouvertes doivent être appréhendées avec réalisme et tenir compte des conditions précises de construction d’un CMS intercommunal :
- Pour chaque période triennale, l’objectif de réalisation de LLS, pour l’ensemble des communes déficitaires de l’EPCI, ne peut être inférieur au nombre total de logements locatifs sociaux à atteindre par ces communes. Si les communes de l’EPCI peuvent réduire jusqu’à deux fois leur objectif, à l’échelle intercommunale les objectifs de rattrapage SRU resteraient inchangés. Il s’agit donc de vases communicants au sein d’une intercommunalité.
- Et les logements sociaux non produits par une commune déficitaire devront être compensés par une autre commune elle aussi déficitaire en LS.
Dans un contexte où la production de logements est de plus en plus complexe, notamment au regard de la trajectoire Zéro Artificialisation Nette, ce contrat apporte des assouplissements, en particulier sur des territoires où le déficit en LS est peu prononcé. Sur des territoires davantage carencés l’impact de cette nouvelle loi sera plus faible.
Dans tous les cas, Sémaphores préconise la construction d’une stratégie intercommunale au préalable qui fasse l’objet d’une construction concertée et négociée entre toutes les parties.