Les titres de participation :
critères d’appréciation et enjeux fiscaux


Un article rédigé par :
Sébastien MIALET – Associé/partner – Expert-comptable – Département Expertise Conseil – GVA – in
L’administration fiscale a mis à jour sa doctrine relative aux titres de participation en intégrant différentes décisions de jurisprudence au cours de l’année 2024. Dans le cadre des futurs arrêtés de comptes, nous en profitons ainsi pour effectuer quelques rappels relatifs à la notion de titres de participation (exclusion faite des titres à prépondérance immobilière).
Il est courant, pour une société de réaliser des placements financiers ou d’acquérir des titres dans le cadre d’une gestion de participations financières (holdings). Les plus ou moins-values de cessions seront alors soumises à un régime fiscal spécifique qui dépendra du % de détention, des objectifs poursuivis et de l’horizon de détention.
L’enjeu majeur de la qualification des « titres de participation » sera de pouvoir bénéficier d’un régime de quasi-exonération de plus-values en cas de cession des titres.
Qualification de titres de participation : les conditions à remplir
La qualification des titres de participation peut reposer sur deux approches :
> Une approche comptable (article 221-3 du PCG) :
Les participations sont constituées par les droits dans le capital d’autres structures, qui, en créant un lien durable avec celles-ci, sont destinés à contribuer à l’activité de la société détentrice. Sont ainsi présumés être des participations, les titres représentant une fraction du capital supérieure à 10 % (c. com. art. R. 123-184).
Les titres de participation sont ainsi définis comme ceux dont la possession durable est estimée utile à l’activité de l’entreprise, notamment parce qu’elle permet d’exercer une influence sur la société émettrice des titres ou d’en assurer le contrôle (BOFiP-BIC-PVMV-30-10-§ 42-03/04/2024).
L’inscription des titres à un compte « titres de participation » ne constitue pas une décision de gestion au plan fiscal. Si cette écriture comptable est erronée, elle peut être corrigée, tant à l’initiative de l’administration que, sous réserve que cette erreur ne revête pas un caractère délibéré, à l’initiative de l’entreprise.
> Une approche fiscale
Sont qualifiés fiscalement de « titres de participation » (CGI art. 39, 1.5° al. 17 et art. 219, I. quinquies a) :
- Les titres qui revêtent ce caractère sur le plan comptable et qui sont inscrits en tant que tels au compte « Titres de participation » ;
- Les titres considérés comme tels par la loi fiscale : il s’agit des titres ouvrant droit au régime des sociétés mères, à condition que la société mère détienne au moins 5 % des droits de vote de la société émettrice, ainsi que des actions acquises en exécution d’une offre publique d’achat ou d’échange (OPA ou OPE) par l’entreprise qui en est l’initiatrice. Les titres doivent être inscrits en comptabilité au compte « Titres de participation » ou à une subdivision spéciale d’un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable.
Dans tous les cas, les critères qui permettent de qualifier les titres de titres de participation s’apprécient, selon la jurisprudence et la doctrine administrative, à la date d’acquisition initiale en fonction de l’intention de l’entreprise.
Nous retiendrons également que la qualification fiscale des titres de participation ne soulève aucune difficulté dans l’hypothèse où les titres représentent au moins 5 % du capital, dans la mesure où ils ouvrent droit au régime des sociétés mères.
Néanmoins, la définition comptable des titres de participation pourra soulever quelques difficultés. En effet, elle permet de qualifier certains titres en titres de participation, du fait d’une possession en deçà de ce seuil de 5 %. La présomption simple de classement en titres de participation ne porte que sur les fractions de capital supérieures à 10 %. En deçà de 10 %, il faudra démontrer de l’utilité des titres. Le détenteur doit alors justifier, par tout moyen, que l’exercice de son influence, permettra de contribuer réellement à son activité pour pouvoir classer les titres parmi les titres de participation.
Le critère de l’utilité
Comment définir l’utilité d’une participation ? Le Conseil d’État, par un arrêt de 2022, a apporté des éclaircissements (CE 22 juillet 2022, n° 449444) :
- L’utilité peut notamment être caractérisée si les conditions d’achat des titres en cause révèlent l’intention de l’acquéreur d’exercer une influence sur la société émettrice et lui donnent les moyens d’exercer une telle influence.
- Si la détention des titres ne permet pas d’exercer une influence sur la société émettrice ou d’en assurer le contrôle, l’utilité pourra néanmoins être caractérisée, si, les conditions d’acquisition des titres révèlent l’intention de la société acquéreuse de favoriser le développement de ses activités (intérêt économique et stratégique, développement de synergies)
Le critère de l’influence
L’influence pourra résulter de l’existence de prérogatives juridiques, notamment la présence au conseil d’administration.
Le Conseil d’État relève également que le fait qu’une société a la faculté de demander l’inscription d’une résolution aux assemblées générales constitue une prérogative juridique.
Une participation très minoritaire, mais acquise avec un groupe d’investisseurs dans le but de détenir une minorité de blocage au terme d’un certain délai, caractérise également le contrôle de la société émettrice et permet de qualifier ces titres de titres de participation.
« L’éparpillement » de l’actionnariat, dans certaines conditions, permettrait l’exercice d’une influence en dépit de la faiblesse de sa participation. C’est ainsi qu’une décision de la cour administrative d’appel de Marseille du 14 juin 2024 CAA Marseille 14 juin 2024, n° 22MA02242), a validé la qualification des titres de participation dans un contexte de très faible participation (1,59%) dans le capital de la société émettrice. Le critère de l’utilité reposait sur le fait que la holding, même disposant d’une faible participation, pouvait bénéficier de prérogatives juridiques particulièrement importantes en raison de l’éclatement de l’actionnariat (17 directeurs généraux délégués). Les statuts indiquaient par ailleurs, que tous disposaient du même pouvoir de représentation que le président et donc des pouvoirs les plus étendus pour pouvoir agir en toutes circonstances au nom de la société.
Régime fiscal : un régime de faveur
La qualification en titres de participation constitue un avantage fiscal pour les sociétés soumises à l’IS, puisqu’en cas de cession de titres de participation détenus pendant au moins 2 ans, la plus-value réalisée est, sous conditions, exonérée d’IS, sous réserve de la réintégration d’une quote-part de frais et charges de 12 % du montant brut des plus-values.
Néanmoins, la qualification en titres de participation s’avère défavorable lorsqu’une moins-value est constatée, car celle-ci n’est pas déductible du résultat imposable. Elle ne peut d’ailleurs pas s’imputer sur d’éventuelles plus-values constatées par la société, à l’occasion de la cession de titres appartenant à une autre catégorie (la cession de titres de placement). Il en est de même des provisions pour dépréciation constituées en comptabilité à raison de ces mêmes titres de participation, lesquelles ne peuvent faire l’objet d’aucune déduction des résultats imposables.
En date du 19 décembre 2024, le Conseil d’État a validé le fait que les reprises et dotations de provisions pour dépréciation sur titres de participation doivent être retenues pour apprécier l’existence d’une plus-value nette sur de tels titres.
Conclusion
La détention des titres à hauteur d’un minimum de 5% du capital, complétée d’un délai de conservation de deux ans ne soulève aucune difficulté pour la qualification des titres de participation, à condition de les inscrire dans le compte comptable des « titres de participation ».
Dans l’hypothèse d’une faible détention, une analyse des prérogatives juridiques sera nécessaire. L’existence d’une relation d’affaires avec la société émettrice ne suffit pas à elle seule, à justifier de l’utilité d’une présence très minoritaire au capital. Il faudra démontrer une influence par des prérogatives juridiques et des avantages économiques.